Alt-F4 n°42 - Le sens de l’automatisation  16-07-2021

Écrit par Nanogamer7, édité par stringweasel, Conor_, Therenas, Firerazer,
traduit par bev, Firerazer

Sommaire

Dans cette parution n°42 de Alt-F4, après avoir précédement recherché les jeux qui ont inspiré Factorio, jetons un œil à comment Factorio a influencé le genre de l’automatisation dans son ensemble, s’il existe. Peut-être qu’il n’existe pas. Après 7,5 millions d’années de contemplation, Nanogamer a une réponse, et elle pourrait vous surprendre.

Le meilleur dans son genre - L’influence d’un jeu Nanogamer7

Il y a quelques mois (dans le Alt-F4 n°34), j’ai tenté de retrouver les origines de Factorio, et avec lui les origines du genre Automatisation. Mais depuis que Wube l’a inauguré en 2013, de nombreux jeux ont adapté et adopté ses idées, comme Satisfactory et Dyson Sphere Program, mais aussi des jeux plus axés sur la survie comme Astroneer, ainsi que des versions et des mods plus récents pour Minecraft. Dans cet article, je veux explorer ce qu’est devenu le genre de l’automatisation, et comment ce type de jeux se différencient des jeux de survie intégrant une certaine automatisation.

Première partie : Les trois grands

Des spaghettis dans des jeux d’automatisation.

Si vous demandez à quelqu’un de citer des jeux d’automatisation autres que Factorio, les réponses les plus courantes que vous obtiendrez seront Satisfactory et Dyson Sphere Program. Avec Factorio, ils sont même considérés comme la (pas vraiment) Sainte Trinité de l’automatisation par certains joueurs. Mais qu’est-ce qui fait que ces jeux se distinguent des autres (à part leur note, la plus élevée parmi tous les jeux sur Steam avec le label “automatisation”) ?

Capture d’écran de SteamDB montrant Factorio 1er, DSP 2e et Satisfactory 3e.
Les jeux les mieux notés avec le label automatisation sur SteamDB.

  • Ces trois jeux se déroulent dans un monde ouvert et vous, le joueur, y êtes une entité qui construit l’usine. Mais aucune de ces conditions n’est nécessaire à l’automatisation, car par exemple shapez.io fonctionne parfaitement sans personnage jouable, et il existe de nombreux jeux comme Opus Magnum qui se situent dans un contexte de casses-têtes basé sur des niveaux.
  • Votre progression se fait principalement par le biais d’un arbre de compétences/technologies (même s’il est très superficiel dans Satisfactory), de technologies spéciales à envoyer via un ascenseur spatial dans Satisfactory, de matrices de recherche dans DSP, et, enfin, de packs de science en forme de fiole dans Factorio. La plupart des jeux (de survie) à monde ouvert comportent une sorte d’arbre de compétences, mais l’acquisition de nouveaux éléments est rarement liée au monde du jeu. Les usines, cependant, sont essentiellement construites pour l’arbre technologique lui-même ; vous n’avez pas de conditions à remplir pour limiter votre progression dans “l’histoire”, celles-ci sont directement liées à la progression vers l’objectif final.
  • Enfin, les trois jeux mettent principalement à l’épreuve vos connaissances et votre compréhension de la logistique. Bien que l’aspect spaghetti de certaines bases puisse laisser penser le contraire, l’espace n’est pas vraiment un problème (ou du moins pas un gros problème) en raison du monde ouvert, mais le transport de quantités massives de ressources brutes d’un avant-poste minier à votre base principale nécessite de surmonter des obstacles tels que les aspects mécaniques, les débits et l’environnement. Et cela peut devenir encore plus difficile. Par exemple le déménagement de la production vers ledit avant-poste pour exporter les produits les plus denses/compacts possibles (voir le Alt-F4 n°7) utilise des ratios complexes pour obtenir la meilleure efficacité. Ce défi est peut-être le résultat direct du caractère monde ouvert de ces jeux, mais les camions et les trains à longue distance apportent une variable “inconnue” indispensable à ces ratios (inconnue dans le sens où elle n’est pas aussi évidente que les objets par seconde sur les convoyeurs), ainsi qu’un défi, un goulot d’étranglement dont l’échelle est inversement proportionnelle à la production.

Les différents arbres de recherche, avec DSP plus similaire à Factorio, et Satisfactory avec son système de niveaux superficiels.

Outre ces similitudes de style, les trois jeux présentent un scénario remarquablement similaire, à savoir que le joueur est lâché sur une planète déserte. Mais il s’agit probablement de la raison narrative la plus évidente pour justifier le fait que le joueur doit partir de zéro. Cet article ne s’attardera pas sur l’histoire derrière ces jeux, mais se concentrera plutôt sur le mécanisme de jeu lui-même.

Ce sont là quelques-unes des plus importantes similitudes entre ces trois jeux. Il y en a certainement d’autres plus petites, ou dans des domaines autres que le style de jeu, mais si vous allez au fond des choses, ce sont ces trois-là qui les définissent (les trains n’en faisant malheureusement pas partie). Mais comment les jeux qui ne sont généralement pas considérés comme des jeux d’automatisation s’inscrivent-ils dans ce schéma ?

Deuxième partie : L’automatisation dans d’autres jeux

En parlant du scénario, il existe un quatrième jeu avec ce scénario, avec un concept similaire de multiples petites planètes, avec une excellente notation sur Steam pour “automatisation”, et il est sans doute encore plus populaire que les trois autres jeux : ASTRONEER. Mais pourquoi n’en ai-je pas parlé avant ? Il a effectivement un scénario similaire, vous pouvez automatiser de grandes parties de votre production, etc.

Revenons à l’article précédent. Que signifie au juste l’automatisation ?

On pourrait définir grossièrement l’automatisation comme “faire des choses qui font des choses”.

One could loosely define automation as “making stuff that makes stuff”.

— Nano

Gardez à l’esprit qu’il ne s’agit que d’une des définitions possibles du genre, mais elle se heurte déjà à certains problèmes. Par exemple, l’alliage de nanocarbone, l’un des matériaux les plus importants en fin de partie de Astroneer, ne peut déjà pas être automatisé à l’une des étapes les plus basiques, à savoir réunir toutes les ressources nécessaires, ce qui n’est pas nécessairement un mal, vu que le jeu n’a pas été développé comme un jeu d’automatisation. Le bras automatique, et avec lui d’autres outils d’automatisation, n’a été ajouté qu’avec la version 1.13, soit une année après la sortie de la version 1.0 de ce jeu de survie pure.

De nombreux jeux (de survie) comportent aujourd’hui une sorte d’automatisation : l’entonnoir de Minecraft, ajouté avec la version 1.5 au début de 2013 est le premier exemple de transfert simple de machine à machine que j’ai pu trouver, et pourrait avoir également inspiré le bras de Factorio. Mais le bras automatique dans ASTRONEER, la mineuse automatique, les convoyeurs de TerraTech, les tapis roulants dans certains niveaux d’Overcooked sont tous des réminiscences de mécanismes similaires dans Factorio, et tous sont sortis après que Factorio soit devenu populaire. Et puis il y a les mods. En gros, tous les mods technologiques de Minecraft depuis la version 1.6.4 (bien qu’ils puissent aussi être influencés par d’anciens mods de Minecraft) proposent un système d’automatisation.

Pourtant, aucun des jeux ci-dessus ne fait de l’automatisation un mécanisme essentiel, elle n’en est qu’un complément. Vous pouvez passer énormément de temps à construire des machineries complexes, des usines compliquées et des rovers extrêmement compacts, mais aucun d’entre eux ne vous fait directement progresser dans le jeu. Vous devez toujours explorer, découvrir, combattre et décorer votre chemin vers votre objectif final. On peut cependant trouver un argument en faveur de SkyFactory, l’un de mes packs de mods Minecraft préférés, qui contourne le problème de l’exploration en n’ayant rien à explorer. Il vous permet tout de même de loger votre usine dans de beaux blocs, de la décorer avec des fleurs, ce qui est l’autre objectif principal de Minecraft, et qui ne vient que comme une option secondaire dans Factorio.

Comment les jeux qui ne sont pas généralement considérés comme des jeux d’automatisation entrent-ils dans le schéma de la première partie ? La logistique se présente sous la forme de la gestion des stocks, et fait partie intégrante des jeux de survie, tout comme le monde ouvert. Et l’arbre de compétences, que les jeux d’automatisation rendent complètement irréalisable manuellement, est simplement complété par l’automatisation dans les autres jeux. Cet ajout est la partie importante, ajouter l’automatisation comme une mécanique parmi d’autres est devenu populaire avec le succès des jeux d’automatisation.

Troisième partie : Jeux de simulation, de détente et de réflexion.

Jusqu’à présent, la plupart des jeux sont, d’une manière ou d’une autre, des jeux de survie en monde ouvert ou des jeux de création, mais il existe un sous-genre d’automatisation avec lequel la plupart d’entre nous sont entrés en contact et jouent régulièrement : la conception de la chaîne de montage elle-même. Il existe de nombreux casse-tête d’automatisation qui se concentrent exclusivement sur cette partie. On peut citer par exemple Opus Magnum, comme déjà mentionné, ou factori, un jeu qui a obtenu l’une des premières places lors du récent concours de jeux GMTK 2021. Mais ils correspondent à la définition (“tu fais des choses qui font des choses”) : des produits chimiques dans l’un, et des lettres dans l’autre. Est-ce que Emergency Protocol (il y a beaucoup de jeux de réflexion dans les concours de jeux d’ailleurs) correspond à la définition ? Vous construisez un schéma qui crée un chemin ? Au fond, cela ressemble à de l’automatisation, vous dites à un petit robot ce qu’il doit faire (vous le programmez), et il répète vos ordres. Mais cela ressemble aussi aux jeux de détente, mettez en place quelque chose, et il fait un travail pour vous pendant votre absence.

À ce propos, les jeux de détente ne sont pas vraiment considérés comme des jeux d’automatisation, pas plus que les jeux de gestion ou de simulation, comme je l’ai expliqué dans mon dernier article. Mais il y a aussi le concept d’automatiser Factorio lui-même, ce que certains joueurs ont réussi à faire. Plus sérieusement, certains joueurs considèrent réellement Factorio comme un jeu de gestion. Avec les mégabases, toutes les chaînes de montage, tous les problèmes sont souvent déjà résolus, votre travail consiste désormais à équilibrer les différentes ressources et énergies, et à gérer l’usine à plus grande échelle.

Conclusion

Pour résumer, l’automatisation n’est pas encore un type de jeu comme “jeux de réflexion”, mais elle peut certainement en être le genre déterminant. Cependant, il est toujours possible d’ajouter l’automatisation à un jeu, sans qu’elle soit à la base de celui-ci. Ceci étant dit, mon dernier article avait laissé l’automatisation un peu plus dans le vague, et j’espère pouvoir en donner une définition et une conclusion plus SATISFACTORYque cette fois-ci en FACTORIant aussi dans des jeux plus récents.

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